Le Conseil régional de Bretagne a publié une étude sur la pratique et la perception du breton et du gallo dans la population bretonne. Pour l’Union démocratique bretonne, les résultats de cette étude démontrent le besoin d’une politique linguistique plus ambitieuse. Première analyse et propositions de l’UDB pour le breton.
Les attentes sont fortes dans la population concernant la langue bretonne. Une majorité de sondés demande plus de breton dans les médias, les services publics, l’enseignement. Les trois quarts soutiennent l’enseignement du ou en breton et un tiers des sondés souhaite que leurs enfants apprennent la langue. Quel contraste avec la réalité de l’enseignement du breton, quand moins d’une école sur 10 propose une filière bilingue aux parents! Le peuple breton est toujours largement privé de sa langue.
Malgré une stabilité apparente des chiffres depuis 2007, le risque est fort que le nombre de locuteurs de breton s’effondre dans les 30 années à venir. Les trois quarts d’entre eux ont en effet plus de 60 ans. Le nombre de brittophones tomberait alors à à peine plus de 50 000 en 2050 (200 000 aujourd’hui), alors que les attentes populaires devraient nous amener à plus d’un million de brittophones, si les politiques publiques étaient au rendez-vous. Pour éviter l’effondrement et stabiliser le nombre de locuteurs, il faudra en former 5000 par an dans les trente années à venir; et pour répondre aux attentes de la population, plus de 30 000. On en forme aujourd’hui moins de 1000 chaque année! Seul un développement massif des classes bilingues ou immersives et des formations pour adulte peut donner le coup d’accélérateur indispensable.
L’Union démocratique bretonne appelle à la création d’un statut public régional pour le réseau Diwan, afin de lui permettre de sécuriser ses finances et d’accélérer son développement; à un vaste plan de formation à destination des professeurs de l’Éducation nationale, pour leur permettre d’enseigner leur discipline dans des classes bilingues; et enfin à une augmentation considérable du budget régional de la langue bretonne. Ce budget est aujourd’hui limité à 6 millions d’euros par an, une goutte d’eau dans la mer! Pour espérer mener une politique linguistique ambitieuse et efficace, sur l’exemple de celle du Pays de Galles ou du Pays Basque sud, il faudrait porter à terme ce budget à 100 millions d’euros, dans le cadre d’une augmentation du budget général de la Région. Cela ne représenterait que l’équivalent de 2 euros par mois et par habitant de la Bretagne, soit deux cafés… est-ce trop cher payé pour l’avenir d’une langue? A plus court terme il est déjà possible d’améliorer l’existant en augmentant le budget de 1,5 millions d’euros par an dès 2019.
Si le maintien puis la progression du nombre de locuteurs est bien entendu la priorité, d’autres aspects de la politique linguistique doivent être renforcés. Seuls 40% des locuteurs pratiquent régulièrement le breton, preuve que la place qui est faite à notre langue dans l’espace public est insuffisante. L’UDB défend le principe d’une co-officialité du breton et du français, afin de mettre les langues à un niveau d’égalité juridique et de lever le tabou sur l’usage public de la langue bretonne. La majorité des Bretonnes et des Bretons sont justement favorables à l’usage du breton dans les services publics. La place de la langue bretonne dans les médias publics doit également être renforcée, à rebours de l’attitude de certaines directions pour qui les émissions en langue bretonne servent systématiquement de variable d’ajustement…
Enfin, la connaissance de la langue est insuffisante dans la population: 60% des bretonnes et des bretons ne connaissent pratiquement aucun mot ou expression. Afin d’éviter que les locuteurs ne soient coupés du reste de la population, et afin d’éviter que le breton ne devienne une langue étrangère sur son propre territoire, il apparaît nécessaire de systématiser l’initiation au breton à l’école. La création de modules régionalisés à l’intérieur des programmes scolaires permettrait aussi d’apporter quelques éléments de culture générale indispensables sur l’histoire et la situation socio-linguistique du breton.
La Bretagne est à un tournant : se réappropriera-t-elle sa langue ou la laissera-t-elle à une petit groupe de militants convaincus? Les attentes populaires sont là, elles justifient un saut qualitatif et quantitatif dans la politique linguistique de la région, et appellent indirectement un certain nombre d’évolutions législatives. La balle est dans le camp des pouvoirs publics. A eux de prendre la mesure l’enjeu. L’UDB appelle le Conseil régional de Bretagne à revoir à la hausse ses ambitions pour la langue bretonne.